Le Colombier

XVIe et XVIIIe siècles, calcaire (diamètre 7 mètres)

Ce colombier était dressé dans l'enceinte de l'ancien château. Primitivement, sa toiture est probablement en forme conique et possède des ouvertures orientées vers les quatre points cardinaux. Les boulins, ou nids, sont accessibles par une échelle portée par une pièce de bois verticale et tournante. Le bâtiment est édifié avec les mêmes matériaux que le corps du logis. Il est établi à proximité de l'habitation afin de limité les visites nocturnes des rôdeurs et afin que les volatiles, dont la chair est appréciée soient proche des cuisines. Les colombiers, qui parachèvent la construction des manoirs ou châteaux, ont été la cible d'importantes destructions dans notre région. En effet, les révolutionnaires de 1789 se sont attaqués à ces symboles seigneuriaux, l'élévation de ces édifices relevant du privilège.

Le colombier par Michel LEGROS ancien conseiller municipal 2001/2007
Avec l’aimable autorisation de Mme Legros

La présence d'un colombier sur notre commune prouve qu'il existait un fief seigneurial important.

L'élevage des pigeons apportait au seigneur, sa famille sa suite, ses gens d'armes l'appréciable chair fraîche des pigeonneaux à une époque où on consommait beaucoup de salaisons et de fumé. Le pigeonnier représentait un « garde-manger perpétuel » disait Olivier de Serres en 1600 (Théâtre de l'Agriculture). 

De plus la fiente de pigeon : la colombine, constituait un engrais très convoité pour l'amendement des terres, le meilleur de tous les fumiers d'après le même Olivier de Serres. Elle entrait dans la dot du mariage. 

Le colombier est très souvent cylindrique et couvert d'un toit en poivrière.

Le nôtre, à Cambes en plaine, n'a pas de toiture (en a-t-il eu une ? peut-être pas si l'on observe le ressaut maçonné en auvent à l'intérieur…). Si nous supposons l'existence d'une toiture, nous devrions trouver une lucarne d'envol édifiée dans la charpente. Cette lucarne était fermée par un panneau de bois percé d'ouvertures calibrées aux dimensions des pigeons (10cm de diamètre), cela interdisait l'entrée des redoutables rapaces.

Le colombier a normalement un bandeau à mi-hauteur appelé larmier qui a pour rôle d'empêcher les prédateurs, comme la fouine et autres « puants »d'enter à l'intérieur. Il s'agit d'un ressaut en pierre convexe présentant une forte saillie. (Notre colombier n'en possède pas) 

Une unique porte étroite, souvent tournée vers l'habitation principale, de façon à ce que les allers et venues soient surveillés, est située au ras du sol. Chez nous, à Cambes, la porte, côté place, a été percée plus tard afin d'utiliser cet édifice à d'autres fins suite à l'abolition du privilège de « doit de colombier » (1789) 

Toute la périphérie intérieure est tapissée de niches appelées « boulins ». En principe les premiers boulins s'élèvent au dessus d'un muret de garde d'environ 80 cm qui les met hors de portée du saut des rongeurs. Ces nids sont disposés en quinconce de façon à ce que les déjections des pigeons ne souillent les boulins de la rangée inférieure. Le nombre de boulins est proportionnel à la superficie du fief. D'après le droit coutumier en vigueur dans le nord de la France , le seigneur possédait un boulin par acre de terre soit environ 52 ares. Le colombier de Cambes en Plaine compte 725 boulins ce qui laisse supposer que notre châtelain régnait sur environ 375 hectares. 

Le colombier, bâtiment spécifique pour l'élevage intensif des pigeons, présente à l'intérieur un aménagement étudié pour répondre aux exigences de salubrité, d'efficacité et de rentabilité. Pour accéder aisément aux boulins ou nids, les entretenir, ramasser la colombine, recueillir les pigeonneaux et les œufs, on se sert d'une échelle tournante appuyée sur une potence horizontale, reliée à un arbre vertical qui pivote sur une crapaudine par l'intermédiaire d'une pointe appelée foire. Cet astucieux système ne laissant aucun angle mort est particulièrement bien adapté pour les colombiers circulaires. L'intérieur du colombier ayant été transformé, cette échelle a disparu.

Finalement notre colombier est vraiment atypique, pas de toiture, pas de larmier, pas de muret mais… c'est notre colombier !. Alors… si vous avez des informations sur les colombiers Bas Normands, n'hésitez pas, dites nous tout.